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BRAHIM SACI l’héritier de Da SLIMANE

BRAHIM SACI l’héritier de Da SLIMANE


Brahim Saci se présente ainsi dans sa biographie :« Déjà poète adolescent, s’inspirant de Baudelaire (1821-1867), de Rimbaud (1854-1891) et de Nerval (1808-1855), Brahim a très tôt baigné dans les Arts. Déjà enfant, il était fort doué en dessin, il devint des années plus tard, dessinateur, caricaturiste. Après une licence, langues étrangères appliquées, affaire et commerce, et une maîtrise en anglais, traduction scientifique et technique, il se passionne pour la musique et approfondit l’écriture. Il devint alors Auteur, Compositeur, Interprète d’expression franco-berbère de Kabylie. Animateur à Radio Beur en 1992, à Radio France Maghreb en 1995, de 1993 à 1997 il présente des rubriques littéraires dans le domaine berbère à Bellovaque FM. A Beur FM de 1996 à 1997, à France Maghreb FM de 1998 à 2000, il présente des rubriques sur l’histoire antique des berbères. »


Parcours d’artiste, multidisciplinaire, Brahim fais penser beaucoup plus à ces savant du moyen âge, à l’image de Léonard de Vinci, par exemple, qui surent être en même temps architectes, médecins, peintres, philosophes….
Enfant de l’exil le petit Kabyle éduqué en France, refuse de se renier…dans certaines de ses interviews il se dévoilera ainsi : » j’espère que mon cas servira d’exemple. Il est vrai qu’avec la scolarité nous perdons notre langue natale, mais pour ma part, je l’ai en quelque sorte redécouverte, surtout avec quelques auteurs qui m’ont beaucoup marqué. Je veux parler de Mouloud Mammeri, de Mouloud Feraoun… quant à Slimane Azem, ce poète génial, il m’a ouvert les portes de l’art et m’a appris à aimer la langue Kabyle, pour laquelle il a sacrifié sa vie. »


De son idole Slimane AZEM il dira : » Je ne le fais pas exprès, mais c’est une grande fierté pour moi. Ma musique comme la sienne tire sa source du folklore kabyle et du chaâbi (musique populaire algérienne). Slimane Azem est le seul qui a su le mieux décrire les sentiments collectifs de l’époque, il fut le porte-parole de tout un peuple pendant près d’un demi-siècle. La beauté du verbe que j’ai rencontré chez Baudelaire, je l’ai retrouvée chez Slimane Azem. Mais Slimane Azem avait quelque chose de plus car il était une légende de son vivant, il était un grand philosophe et un grand visionnaire. »
Brahim SACI, à l’image de Slimane, vit l’exil. Cet exil douloureux et formateur d’homme et de talent. Qui peut en parler mieux que lui. Ce sera déjà une bonne raison de l’écouter.
Notre reporter l’a rencontré à Azazga, il se livrera plus amplement…
Ferhat TIZGUINE.

Rencontré à Azazga en compagnie de Mr HADJMI Abdenour qui active dans l’éducation et le secteur associatif culturel qui nous promet bientôt un entretien, le célèbre chanteur kabyle Brahim Saci a bien voulu nous accorder un entretien.

l’entretien est réalisé par Rachid YAHOU, mon ami et collègue.

Rachid Yahou: Présentes toi à nos lecteurs s’il te plait?


Brahim Saci: Je vis en France depuis 38 ans, je suis originaire du village Tifrith Nath Oumalek, un village qui relève de la commune Idjeur dans la Daira de Bouzeguene, au pied de l’Akfadou.


Rachid Yahou: As-tu un ou des projets en ce moment ?


Brahim Saci: Les projets foisonnent dans ma tête effectivement mais devant les difficultés de l’existence je me retrouve souvent bloqué malgré l’énergie de mes pensées. Lorsqu’une porte s’ouvre, une autre se referme immédiatement. Toutefois les capacités acquises jusque là ainsi que les bagages culturels et l’expérience professionnelle m’encouragent et laissent entrevoir une éclaircie. J’ai deux albums en préparation, de plusieurs années de réflexion. Ce long travail est mûrement réfléchi afin d’atteindre la maturité attendue. Ces deux albums ne sortiront pas en même temps. Le premier que je nomme « la fable du troubadour » (taluft umeddah) concerne la création artistique en générale et la place du poète dans la société en essayant de tirer une certaine morale. Quand au second, « l’amour se fait rare » (qlilet lemhiba), il est une réflexion sur le monde actuel, sur l’humain en particulier, en tentant d’approfondir la pensée philosophique.


Rachid Yahou: Comment vis-tu l’émigration par rapport à ta culture Amazighe ?


Brahim Saci: Je vis mon éloignement du pays difficilement bien sûr. La solitude nous accompagne comme une ombre. Nous n’avons pas vraiment l’impression d’exister. Notre culture n’est pas médiatiquement visible. Le racisme grandissant nous rend la vie pénible même si des associations culturelles Berbères notamment la Coordination des Berbère de France œuvrent pour une visibilité de notre culture ancestrale, mais la formation d’un véritable réseau reste à faire. Les réussites restent souvent individuelles et individualistes avec parfois un certain mépris pour la culture d’origine et cela de la part même de ceux qui prétendent la défendre. Nous sommes hélas presque invisibles dans la société française! Mais le combat de toutes ces associations berbères cultive l’espoir de voir la culture occuper la place qui lui revient de droit et qu’elle mérite en France. Un exemple et pas des moindres est la célébration du nouvel an berbère « yennayer » par la ville de Paris qui est en soi un grand acquis et une grande victoire. Les Berbères de France s’organisent enfin pour défendre leurs droits.


Rachid Yahou: Quelle est la place de la chanson Kabyle à ton avis ?


Brahim Saci: La chanson kabyle a toujours eu une place de choix, que ce soit en Algérie ou en France. remplissant les salles les plus prestigieuses en Algérie et en France. La chanson à textes s’est grandement imposée jusqu’à ces dernières années. Nous avons vu aussi un style festif répondant à une certaine mode fabriquée par le marché et soutenue par le pouvoir envahir les médias. Mais il serait naïf de croire que la chanson kabyle régresse loin de là ! Bien au contraire elle a donné naissance à beaucoup de créateurs de qualité qui souffrent seulement d’un manque de médiatisation et d’un manque de moyens, la chanson à texte dont la chanson chaaâbi peine à s’imposer pour ses raisons. Il appartient au Ministère de la Culture de subventionner cet art majeur pour qu’émergent les styles de qualité.


Brahim Saci: Que penses-tu des autres chansons Berbères ?


Les autres chansons berbères des autres régions d’Algérie doivent elles aussi bénéficier de subventions étatiques pour permettre à ses nombreux talents de percer. La création de festivals de la chanson Berbère ouverts à tous les créateurs montrera la richesse poétique extraordinaire que recèle notre beau et vaste pays. Il faudrait créer un grand festival dans chaque région d’Algérie pour permettre à toutes les couleurs de toutes les régions de ce fabuleux pays de s’exprimer. Aujourd’hui hélas seuls les artistes qui courtisent le pouvoir ont accès aux festivals existants, nous voyons ainsi tourner toujours les mêmes artistes!


Rachid Yahou: Comment vois-tu l’avenir du pays justement ?


Brahim Saci: Par rapport aux récents événements du printemps arabe, l’officialisation par le Maroc de la langue Berbère est une grande avancée historique et un grand espoir. J’ose de tout cœur espérer que l’Algérie suivra cet exemple. La démocratie est inévitable et s’imposera d’elle-même tôt ou tard. Le peuple algérien a payé un lourd tribut pour accéder à cette démocratie. Des pays ont profité de l’expérience algérienne et ont donc prit une certaine avance. J’espère que les intelligences qui existent dans notre pays apporteront un changement radical du système, des mentalités, vers une réelle démocratisation. C’est ainsi que nous pourrons inscrire notre nom dans l’histoire. Aucune évolution n’est possible sans une véritable démocratie, un système juste et une justice sociale donnant les mêmes chances à tous!


Rachid Yahou: Ton souhait.


Brahim Saci: Faire le tour de l’Algérie, visiter toutes les régions, me ressourcer et m’imprégner de tous les styles musicaux qui sont d’une richesse extraordinaire car chaque région a sa spécificité culturelle.


Rachid Yahou: Un bon souvenir ?


Brahim Saci: Le printemps en Algérie avec ses merveilleuses couleurs.


Rachid Yahou: Un mauvais souvenir ?


Brahim Saci: Le printemps noir berbère d’avril 2001 avec la répression sanglante et son lot effrayant de victimes. Plus jamais cela !


Rachid Yahou: Le mot de la fin.


Brahim Saci: Je remercie beaucoup votre quotidien pour m’avoir permis de m’exprimer librement. Je dirais enfin que la démocratie est proche en Algérie et qu’il appartient à chaque algérien de l’accueillir avec paix et sérénité

Ferhat Tizguine et Rachid Yahou

La Cité du 17/11/2013

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